Gonzague Dambricourt

J’aime pleurer

Ca va vous paraître fou, ridicule ou stupide mais c’est comme marcher ou courir sous la pluie. Y a un truc. C’est, d’une certaine façon, transportant.

De prime abord troublant, on se cache. Les sentiments (et les larmes) ne sont pas les choses qu’on maîtrise le mieux dans ma famille. Après tout au plus bas âge on enseigne aux enfants qu’il ne faut pas pleurer. Ou peut être juste aux garçons.

“Papa” est un ours, gentil, prêt à tout pour ses enfants, comme beaucoup de parents j’imagine. Un ours ça a l’air vraiment costaud, prêt à tout, fier. Mais ça laisse transparaître peu de choses et cache parfois sa peine, sa tristesse ou sa joie aux autres, dont les enfants. Dans tout cela il y a sûrement des trucs dont on hérite et qu’il est difficile de changer. Comme de ne pas arriver à le regarder dans les yeux et à lui dire “Je t’aime”.

Qu’est-ce qui m’a fait penser à ça? Je ne sais pas. L’espace d’un instant j’étais dans cet immense avion, à survoler l’Irlande quand, écoutant un morceau de musique, je me suis mis à pleurer.

Sans réelle raison. Passage rapide d’une tristesse à laquelle je ne trouve pas de raison, à la bonne humeur. Si ce n’est de réaliser chaque jour un peu plus à quel point la vie est pleine de surprises, soit-elles bonnes ou mauvaises, de moments forts et extraordinaires.

Et c’est égoïste de dire ça je sais. C’est aussi fleur bleue, c’est aussi un peu idéaliste mais clairement né d’une envie de tenter de ne se souvenir que du meilleur.

Grrr. Je suis un peu fébrile à l’idée de réécrire ainsi sur des pages web qui ne parlent généralement que de gadgets sans âme, de choses au final totalement abstraites, inutiles et dont on se convainc d’avoir besoin. On se sent bête et maladroit. Enfin je me sens. Le “on” n’est qu’une façon de s’en dégager, mettre de la distance. Je me sens bête et maladroit.

Plume incertaine et inexpérimentée. Le seul doute qui subsiste c’est : est-ce que ça arrive aux autres?

Nous sommes partis de Francfort. Après une nuit sans sommeil, en route pour une ville inconnue. 34 995 pieds d’altitude, 975 kilomètres / heure, le bel Airbus trace sa route. Un gigantesque oiseau transatlantique avec à son bord des centaines de gens, des centaines de vies, d’envies, d’espoirs et de façons de faire passer le voyage.

En écoutant “le son”, j’ai pleuré. Pour rien. Mais ça faisait du bien. Un coup d’oeil dehors et je vois l’aile de l’avion, avec en fond un ciel éblouissant. Lumière si forte. Ce n’est pas pour autant aujourd’hui que j’annoncerais avoir croisé Jésus dans les nuages.

Le chanteur répète en boucle “I’m lost”. Un peu comme tout le monde.

Dans la catégorie “déstructuré à mort”, cet article est pas mal. Et pourquoi pas après tout? En cachant mon visage j’ai repensé à mon grand père décédé, au fait que son numéro de téléphone était toujours dans mon répertoire. Le sourire après les larmes, c’est une façon comme une autre de ne pas totalement l’oublier.

J’aime pleurer, écouter des chansons tristes ou joyeuses et perdre mon regard….


Musique : Royksopp – In This Shirt – RYXP Edit

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